Inclusion : ensemble, donnons un coup de pied à la discrimination !

Que se passe-t-il lorsque des champions de football deviennent aussi des champions d'inclusion ? Le bureau de l’Agence Italienne pour la Coopération au Développement (AICS) de Dakar lance une nouvelle initiative de sensibilisation sur les droits des personnes en situation de handicap.

Après l'exposition photo organisée le 8 juin dernier en collaboration avec le photographe Alun Be sur le thème de l'inclusion sociale des personnes vulnérables et le projet de street art réalisé avec des artistes sénégalais, le bureau de l'AICS à Dakar continue la sensibilisation sur les droits des personnes en situation de handicap à travers le football, moyen de communication par excellence et sport qui a toujours prévalu dans le Pays. Ce n'est pas un hasard si le Sénégal a remporté la Coupe d'Afrique des Nations le 6 février 2022.

C'est ainsi qu'il voit le jour une autre initiative de communication de la Coopération italienne qui, à travers le sport, vise à promouvoir un changement de paradigme concernant la stigmatisation et les stéréotypes liés au handicap.

A lancer le projet, une vidéo réalisée en collaboration avec la Fédération Sénégalaise de Football qui met en scène les professionnels du football internationaux sénégalais. C'est ainsi que les champions de football deviennent aussi des champions d'inclusion. De Kalidou Koulibaly à Edouard Mendy, les footballeurs prêtent leur visage et leur image pour devenir les protagonistes directs d'un message visant à sensibiliser le grand public sur l'importance de l'inclusion sociale des personnes en situation de handicap. Ensemble, donnons un coup de pied à la discrimination : c’est le slogan que les Lions de la Teranga ont scandé haut et fort.

Selon des estimations récentes de l'OMS, plus d'un milliard de personnes, c'est-à-dire environ 15% de la population mondiale, présentent une forme ou une autre de handicap. C’est un chiffre qui ne peut absolument pas être ignoré. Au contraire, ces données appellent à une réflexion partagée, à différents niveaux, finalisée à la construction d’une société plus juste dans laquelle personne n’est exclu et les différences deviennent source d'apprentissage mutuelle.

Ensemble, donnons un coup de pied à la discrimination. C'est également le slogan du match à soutien des droits des personnes en situation de handicap qui verra l'Association Italienne de Footballeurs (AIC), les enfants et les enseignants des écoles inclusives de Dakar entrer dans le terrain de foot le samedi 14 mai.

L'événement sera précédé par une session de formation sur le football scolaire du 9 au 13 mai réalisée par les techniciens de l'association AIC dans le cadre du projet PERSEI – Pour un Système Educatif Inclusif. L'AIC a développé un "modèle formatif" basé sur la centralité de l'enfant et non sur ses performances sportives, dans lequel le sport est un outil éducatif de protection des droits et une opportunité d'intégration et d'inclusion scolaire.

Le sport offre un espace relationnel privilégié, devenant un moyen de promotion individuelle, d'inclusion sociale et professionnelle, favorisant la santé et l'autonomisation des personnes en situation de handicap. Dans les activités sportives, le développement personnel et l'estime de soi sont stimulées à travers le groupe, le sentiment d'appartenance, la comparaison avec les autres et le partage des émotions.

Ensemble, donnons un coup de pied à la discrimination, continue d'être l'engagement de la Coopération italienne dans les politiques de développement au Sénégal, axées sur la promotion des systèmes éducatifs et sociaux inclusifs qui tiennent compte des différents facteurs d'exclusion et d'inégalité des personnes les plus vulnérables.

Par Valentina Baraldi
Responsable secteur éducation
AICS Dakar

Mamadou Saliou Camara

Le Dr Mamadou Saliou Camara est un médecin généraliste guinéen, Président du conseil d'administration de l'ONG FMG (Fraternité Médicale de Guinée) et membre actif de l'ONG CARP (Collège des Acteurs pour la Réduction de la Pauvreté).

Le parcours du Dr Mamadou Saliou Camara en tant qu'activiste a commencé dans la première moitié des années 1980, lorsqu'il fréquentait la prestigieuse université Gamal Abdel Nasser. Les années 1980 ont été une décennie de transition d'un régime totalitaire à un régime de libéralisme en Guinée, et par conséquent, la situation chaotique du pays a conduit à diverses impasses socio-économiques et académiques. Les interruptions continuelles du cours normal de l'enseignement ont incité un groupe d'étudiants de l'Université Gamal, dont faisait partie le jeune Camara, à créer une association dont l'objectif principal était de faciliter le déroulement des cours universitaires et l'assimilation des programmes par les étudiants, malgré les difficultés liées à la période historique.

Après avoir terminé ses études de médecine, le Dr Camara et ses collègues ont décidé de suivre la voie de l'activisme, en créant dans les années 1990 une organisation non gouvernementale appelée Fraternité médicale de Guinée (FMG).  L'objectif était d'offrir des conseils et des traitements médicaux gratuits aux groupes les plus vulnérables de la population.

Ces dernières années, l'engagement social du Dr Camara s'est orienté vers le soutien technique, la formation, le coaching de diverses ONG locales et, depuis deux ans, il travaille activement avec l'ONG italienne LVIA (Association Internationale des Volontaires Laïcs) dans le cadre d'un projet sur l'état civil financé par l'AICS, intitulé "Droit au nom" et lié à l'enregistrement des enfants à l'état civil.

L'inscription de l'enfant à l'état civil est un acte fondamental, par lequel on lui garantit une identité juridique, la possibilité de s'exprimer et de s'affirmer socialement, et c'est aussi un moyen de protection. En effet, les enfants qui ne sont pas enregistrés sont exposés à de nombreuses formes d'abus sans aucune forme de protection.

L'acte de naissance accompagnera l'enfant tout au long de sa vie, de la naissance à la mort, dans le cadre de l'éducation, de la vie professionnelle, des voyages, des liens conjugaux, des questions de propriété et d'héritage, jusqu'au dernier acte qui sera délivré, l'acte de décès.

L'enfant qui détient son propre acte de naissance est un enfant protégé, il est reconnu comme un citoyen à part entière et pourra bénéficier de tous les droits auxquels il peut prétendre.

Dans le contexte guinéen, il est important de souligner les principaux obstacles, principalement socioculturels, liés à l'enregistrement d'un enfant à l'état civil. En effet, en travaillant dans différentes régions de Guinée, le Dr Camara s'est rendu compte que les parents sont parfois réticents à faire les démarches nécessaires pour obtenir un acte de naissance, car pour eux le nom de l'enfant est lié à des aspects sacrés et mystiques qui ne peuvent être violés. Dans leur croyance, le fait de parler trop souvent du nom, de le nommer, de le publier dans des documents donnerait aux mauvais esprits et aux personnes malveillantes l'occasion de nuire à l'enfant, c'est pourquoi ils préfèrent donner des surnoms à leurs enfants plutôt que de les appeler par leur prénom.

Un autre obstacle au processus d'enregistrement est la méconnaissance par les parents de l'importance primordiale de l'acte de naissance dans la vie d'un individu, car ils ne sont pas conscients des droits auxquels ils peuvent prétendre.

Globalement, dans le pays, la naissance a été enregistrée pour 62% des enfants de moins de 5 ans et 51% possèdent un certificat de naissance. Dans les zones rurales, le pourcentage de naissances enregistrées chute à 54 % (données EDS 2018).

Dans la région de Labé, dans le cadre du projet "Droit au nom", diverses interventions ont été menées, notamment des pièces de théâtre dans les écoles et des campagnes de sensibilisation impliquant en particulier les enfants et les adolescents. De cette manière, on leur a expliqué l'importance de l'acte de naissance pour le respect de leurs droits et aussi pour un sens de patriotisme, car en défendant leur droit de vote, ils défendent aussi leur patrie. En effet, l'acte de naissance détermine quand une personne est majeure et donc capable d'exercer son droit de vote aux élections ou aux référendums, et in extremis, la possibilité d'être élue à une fonction publique par vote.

Le projet "Droit au nom", par ses initiatives, a suscité un plus grand sens du devoir civique chez les jeunes. Ils ont pris conscience que leurs droits peuvent être bafoués s'ils ne les protègent pas eux-mêmes, et que l'État doit garantir les droits inviolables des citoyens tout en exigeant qu'ils remplissent leurs devoirs inaliénables envers les autres.

Au cours de nombreuses campagnes de sensibilisation et de formation, un accent particulier a été mis sur le registre électoral, lié au registre de la population, grâce auquel le nombre exact de citoyens résidant sur le territoire est connu. La première source du système d'enregistrement est l'individu lui-même, avec ses déplacements, la formation d'une nouvelle famille, les naissances et les décès, qui doivent tous être enregistrés rapidement à l’état civil. Ainsi, un registre de la population régulièrement mis à jour permet d'avoir un registre électoral correct, qui à son tour permet un processus électoral et des élections transparents, l'acceptation des résultats, la sécurité socio-politique et, enfin, la croissance économique à long terme du pays.

Selon le Dr Camara, le projet "Droit à un nom", en approfondissant les connaissances de la communauté, a eu un impact social très fort car des changements dans les attitudes des gens ont été observés.

Les femmes ont eu et ont toujours un rôle crucial dans la procédure d'enregistrement des enfants à l'état civil, car tout commence dans l'établissement de santé où ils sont nés. La déclaration de naissance est délivrée par la sage-femme ou le médecin qui a assisté à l'accouchement, constitue une notification légalement obligatoire et permet l'inscription ultérieure dans le registre d'état civil municipal. À ce stade, la mère reçoit toutes les informations nécessaires pour comprendre l'intérêt de l'acte de naissance, toutes les démarches à effectuer pour l'obtenir et le délai légal dans lequel les documents doivent être remis à l'office d'état civil. Une femme bien informée pourra à son tour transmettre les connaissances qu'elle a acquises à d'autres femmes, et les réunions qu'elles organisent dans les groupes d'entraide deviennent un moyen de transmettre l'information. Une femme bien informée pourra non seulement diffuser des informations correctes, mais aussi convaincre d'autres femmes de changer leurs attitudes et d'adopter des comportements socialement responsables dans une perspective de sauvegarde de la santé et des droits de la famille, tels que des visites prénatales régulières, l'accouchement assisté et l'enregistrement des enfants à l'état civil.

Les femmes sont une énorme source d'idées, de propositions et de solutions alternatives pour stimuler l'enregistrement des enfants, car elles sont les premières à devoir convaincre leurs maris réticents et sont presque toujours obligées de faire elles-mêmes toutes les démarches nécessaires à l'enregistrement, en se heurtant à des obstacles géographiques, financiers et bureaucratiques. Une solution innovante qui a bien réussi à faciliter la procédure consiste, par exemple, à suggérer que le personnel administratif se rende régulièrement dans les établissements de santé afin de faciliter la remise de la déclaration de naissance.

La société guinéenne doit soutenir, encourager et protéger tous les mouvements visant à établir l'égalité politique, économique et sociale entre les sexes, car les femmes, à tous les âges et dans toutes les communautés, ont été et sont encore victimes de discriminations par rapport aux hommes.

À cette fin, il est important de placer les femmes au centre des processus décisionnels afin de favoriser l'adoption par les communautés de comportements et de pratiques propices au développement social et économique de la collectivité.

Par Maria Emma Manfrin  et Myriam Bašić

Zeïnab Koumanthio Diallo

Dialogues d’activisme avec Zeïnab Koumanthio Diallo, écrivaine – avec à l’actif plus de 10 publications - et sociologue guinéenne. Après des études en ingénierie rurale et un master 2 en gestion du patrimoine, elle travaille ensuite comme animatrice et sociologue en milieu rurale pour des ONGs et des organismes internationaux intervenant sur les problèmes de santé, violences faites aux femmes et contre les mutilations génitales féminines.  

Selon Mme Diallo enregistrer les enfants à leur naissance c’est quelque chose d’extrêmement important, non seulement pour l’enfant mais pour toute la société.

L'enregistrement des naissances est indispensable pour assurer le droit des mineurs à l’identité et leur garantir l’accès aux services sociaux de base tels que l'éducation et la santé et les protéger de la violence, des abus et de l’exploitation. Il permet d’avoir accès aux documents d'identité nécessaires pour soustraire l’individu de l’anonymat et l’invisibilité ainsi que pour travailler et participer activement à la vie citoyenne. Selon la dernière enquête démographique (EDS 2018), la naissance de seulement 62% des enfants de moins de 5 ans a été enregistrée à l’état civil en Guinée.

Mme Diallo nous donne un exemple pratique : dans le cas d’une jeune fille mariée de force, pour savoir si c’est un mariage précoce il faut pouvoir vérifier son extrait de naissance car les mariages avant l’âge de 18 ans ne sont plus permis selon le nouveau Code civil de 2019. Cependant, la Guinée est parmi les 15 pays d’Afrique occidentale où le taux du mariage précoce est l’un des plus élevés au monde. Les mariages précoces représentent une pratique répandue sur l’ensemble du territoire, et plus particulièrement en zone rurale. Selon l’Enquête démographique et de santé (EDS) de 2018, 17 % des femmes de 20 à 24 ans ont été en union avant 15 ans et 46,4 % avant 18 ans. En absence d’extraits de naissances, même si le Code pénal exprime l’interdiction formelle du mariage forcé et du mariage entre mineurs, il n’est pas possible de protéger les filles contre cette pratique.

Pour accroitre le taux d'enregistrement des naissances des enfants de moins de cinq ans dans les régions de Labé et Conakry, l’AICS a financé le projet Droit au nom qui a une composante multilatérale mise en œuvre par UNICEF (1,600,000 €) et une composante locale mise en œuvre par l’ONG LVIA (800,000 €). Les objectifs du projet sont : améliorer l'environnement favorable à l’offre de services d'enregistrement des naissances au niveau national et au niveau décentralisé ; réformer les services d’enregistrement des naissances pour les rendre disponibles et fonctionnels dans les Régions de Labé et Conakry ; mobiliser les Communautés à se contraindre à l’utilisation efficace des services d'enregistrement des naissances dans les régions ciblées.

Dans son expérience Mme Diallo remarque que si la Guinée ne connait pas le nombre de ces habitants car il y a des personnes qui ne sont pas enregistrer et qui ne sont donc même pas dans le recensement démographique, le pays ne peut même pas connaitre l’impact de ses politiques publiques. Les problèmes de développement sont liés à ça aussi, sans pouvoir conter et recenser la population ce n’est pas possible d’avoir des politiques publiques efficaces et avec des impacts positifs sur la population car cette dernière reste inconnue. Autrement dit, chaque Etat a besoin de savoir combien de gens vivent sur son territoire, et quels plans il doit préparer pour répondre à leurs besoins.

Les femmes ont un rôle central à jouer pour augmenter les taux d’enregistrement des enfants. Dans un pays comme la Guinée, avec des forts taux d’émigration, il y a beaucoup de femmes qui se retrouvent à couvrir le rôle de cheffe de famille car les maris sont ailleurs. Culturellement, les femmes seules pensent que leur devoir est celui de s’occuper des enfants et que la responsabilité du ménage reste au mari. Le projet Droit au nom a organisé des grandes campagnes de sensibilisation pour faire que les femmes jouent à plein leur rôle de cheffe de famille, y compris pour l’enregistrement de leurs enfants. En ce sens, à travers les campagnes organisées par l’ONG Italienne LVIA, plus de 2000 femmes (enceintes et/ou mères) ont été sensibilisées pour qu’elles adoptent des comportements positifs pour l’enregistrement des naissances de leurs enfants. Grace à ces activités les femmes ont pris conscience de leur rôle centrale dans l’enregistrement de leurs enfants. Cet acte est nécessaire pour obtenir des services essentiels pour leurs enfants, comme la vaccination et l’immunisation gratuites ou subventionnées, le traitement dans un établissement de santé ou auprès d’un fournisseur du gouvernement et l’inscription à l’école.

Une autre action innovante et très fonctionnelle qui a aussi été menée grâce au projet c’est les sensibilisations dans les écoles à travers de contes et des activités théâtrales. Partout où il y a eu les conteurs, il a été possible de faire une réconciliation entre l’école et la communauté et pour cela les autorités scolaires ont demandé de faire continuer cette activité.

Durant trois ans (2018-2021), ce projet a eu un impact positif sur l’augmentation du taux d’enregistrement des naissances des enfants. En particulier, dans les régions de Conakry et Labé, les enfants ont bénéficié respectivement de 65 756 et 62 982 actes de naissance durant la période du projet. Pour la région de Labé, outre ce chiffre, 100.000 enfants sans actes de naissance ont été appuyés afin d'obtenir un jugement supplétif avec une priorité accordée aux enfants de zéro à cinq ans et les enfants scolarisés.

Par Eugenia Pisani

Eugène Kognyuy

Eugène Kognyuy, gynécologue-obstétricien, a été, de 2019 à 2021, le représentant résident de l'UNFPA, l'Agence principale des Nations unies pour les questions de santé sexuelle et reproductive. Il a été professeur de santé reproductive à l'Université de Liverpool au Royaume-Uni, où il a dirigé l'équipe de santé maternelle, mené des recherches qui ont eu un impact sur les politiques nationales et mondiales et fourni une assistance technique aux gouvernements de plusieurs pays d'Europe, du Moyen-Orient, d'Asie et d'Afrique. Féministe.

Au cours des 20 dernières années, le Dr. Kongnyuy a occupé divers postes dans différents bureaux de l'UNFPA. Il a été chef du cluster santé reproductive et coordinateur H4+ en République démocratique du Congo, au Madagascar en tant que conseiller principal en santé maternelle et en Haïti en tant que coordinateur d'urgence en santé reproductive.

Avant de rejoindre l'UNFPA, Eugène était professeur de santé reproductive à l'Université de Liverpool au Royaume-Uni, où il a dirigé l'équipe de santé maternelle, mené des recherches qui ont eu un impact sur les politiques nationales et mondiales et fourni une assistance technique aux gouvernements de plusieurs pays d'Europe, du Moyen-Orient, d'Asie et d'Afrique.

Originaire du Cameroun, il est gynécologue-obstétricien. Il raconte avec transport et émotion, quand, enfant, il s'est rendu à l'hôpital en accompagnant sa mère et a vu une jeune femme qui venait d'accoucher. Il a vu une multitude de sages-femmes près de la femme et a vu la joie de la famille face à une nouvelle vie. Lorsqu'il a quitté l'hôpital, il a dit à sa mère qu'il aurait tout fait pour devenir obstétricien! Cette pensée l'a accompagné jusqu'à ce qu'il devienne médecin et décide de se spécialiser en obstétrique et de devenir gynécologue afin de pouvoir faire quelque chose de concret pour protéger les femmes pendant un moment si délicat de leur vie.

Il est titulaire d'un doctorat en médecine de l'Université de Yaoundé I (Cameroun) et d'un doctorat en santé publique (PhD) de l'Université de Staffordshire (Royaume-Uni). Il est également titulaire d'une maîtrise en santé publique (MPH) de l'Université hébraïque (Israël) et d'une maîtrise en administration des affaires (MBA) de l'Université du peuple (États-Unis). Il a publié plus de 90 articles scientifiques dans des revues de renommée internationale, ainsi que cinq livres.

Sa mission au Mali, qu'il a quitté en septembre 2021 pour rejoindre le personnel de l'UNFPA au Cameroun, consistait à atteindre 3 objectifs principaux : zéro décès maternel ; aucun besoin non satisfait en matière de planning familial ; zéro VBG et pratiques néfastes.

Des objectifs ambitieux, mais pour les atteindre, l'Agence Italienne pour la Coopération au Développement (AICS), en synergie avec l'UNFPA, a décidé de fournir une assistance à des centres, tels que le One Stop Centre, où les femmes survivantes de la violence peuvent recevoir une prise en charge holistique, à travers des services sanitaires, médicaux, psychologiques, sociaux, de protection et juridiques, en toute sécurité et à l'abri des regards discriminants.

Le Dr. Kongnyuy, par le biais de son établissement, espère qu'il n'y aura plus de décès de femmes en couches, en assurant un service de qualité à chacune d'entre elles, grâce à la formation du personnel et à la fourniture de maternités préfabriquées destinées à être utilisées dans les zones les plus inaccessibles du pays. En 2020, l'AICS a soutenu le recrutement de 50 sages-femmes, qui servent actuellement dans la région de Mopti, l'une des régions les plus touchées par la crise, où les rebelles armés ne permettent pas à la population d'accéder aux services de base tels que les maternités et les hôpitaux en général. Dans les dernières statistiques disponibles pour le Mali, le taux de décès maternels à l'accouchement est de 368 pour 100 000 naissances et de 34 décès néonatals pour 1 000 cas.

Au Mali, 39,7% des filles âgées de 15 à 19 ans sont mariées et 39% d'entre elles sont déjà mères. En moyenne, une femme malienne donne naissance à six enfants au cours de sa vie, bien qu'il existe des cas de femmes donnant naissance à dix enfants. Dans ce cas, dit le docteur, il est nécessaire de les éduquer, de leur faire comprendre la nécessité et les avantages de l'utilisation des contraceptifs en termes de santé maternelle et infantile, en termes sociaux et de revenus. Le Mali est un pays où l'utilisation des services de planification familiale est faible (10,3 % de contraceptifs modernes contre 26 % de besoins non satisfaits) en raison de divers facteurs, culturels et structurels, et parmi les plus importants figurent le dysfonctionnement de l'offre et de la distribution, la faible qualité, la disponibilité et l'accès aux services et aux produits, en particulier pour les adolescents, les jeunes et les personnes défavorisées des zones rurales.

Le nombre moyen d'enfants varie également de manière significative en fonction du lieu de résidence ; les femmes des zones rurales ont environ deux enfants de plus que les femmes des zones urbaines. La fécondité varie également selon les régions, de 3,6 enfants par femme dans la région de Kidal et 4,8 enfants par femme à Bamako à 7,3 enfants par femme dans la région de Tombouctou. La fécondité est plus faible à mesure que le niveau d'éducation augmente. Les femmes ayant fait des études secondaires ou supérieures ont, en moyenne, 4,5 enfants, contre 6,8 pour celles qui n'ont pas fait d'études. La fécondité varie également en fonction du niveau de vie de la famille. Les femmes du quintile inférieur des ménages ont, en moyenne, 7,5 enfants, contre 4,6 pour celles du quintile supérieur. Pour toutes ces raisons, l'UNFPA met gratuitement à disposition des contraceptifs dans les lieux que les gens fréquentent le plus, comme les salons de coiffure pour filles et les endroits où les hommes se réunissent pour regarder la télévision.

Le Dr. Kongnyuy nous montre comment le "dividende démographique", c'est-à-dire le processus par lequel le taux de natalité d'une nation diminue et la part des travailleurs actifs dans la population totale augmente peut conduire au développement de la société et, en même temps, à la paix. Si vous visualisez une société sous-développée de manière schématique, vous verrez une pyramide avec, en haut, des personnes qui travaillent et produisent et, en bas, des enfants ou des personnes improductives. À l'inverse, une société qui tente de se développer positivement peut être schématisée comme une pyramide inversée : beaucoup de gens travaillent et produisent et quelques-uns ont besoin d'être nourris. Pour provoquer ce changement, les démographes parlent de "transition démographique". Tous les pays développés ont effectué cette transition. La société doit chercher des moyens de modifier le taux de fécondité, c'est-à-dire de réduire le nombre d'enfants par femme, ce qui peut modifier la structure même de la société, qui ne sera plus pyramidale et pourra favoriser l'accès à l'éducation, à la santé et à l'emploi pour tous. Selon Eugène, les pays africains n'ont pas encore effectué cette transition, alors que les pays asiatiques l'ont fait.

En général, cependant, la population malienne n'a pas accès aux services de base tels que l'éducation, la santé et la justice. Le Dr. Kongnyuy considère le "triple nexus" comme la meilleure stratégie à appliquer dans un contexte aussi pauvre. Il est donc nécessaire d'intervenir à la fois aux niveaux humanitaires, du développement et de la paix, et d'impliquer activement les femmes et les filles.  Il est nécessaire d'assurer la paix et la cohésion sociale entre les différents groupes ethniques, tribus et villages afin de garantir le développement et l'assistance aux personnes nécessiteuses et les plus vulnérables.

Il ne faut pas oublier la situation des personnes handicapées, qui sont encore plus fragiles que les autres : elles sont marginalisées, n'ont pas accès aux services de base ni aux revenus. En particulier, le Dr. Kongnyuy donne l'exemple d'une femme qui, après un accouchement compliqué, a développé une fistule obstétricale. Cette femme a été abandonnée par son mari, sa famille, s'est retrouvée dans la rue, accusée d'être la cause de sa propre maladie, d'avoir fait quelque chose de grave et que Dieu l’avait punie. À cause de la fistule, elle ne peut pas travailler, elle ne peut pas cultiver, elle est totalement exclue et marginalisée et n'a aucun avenir. Cet exemple peut être transposé à tous les autres types de handicap et c'est pourquoi l'AICS, dans sa programmation 2021, a alloué un financement à l'UNFPA au niveau régional (Sénégal et Mali) pour permettre aux personnes handicapées, en particulier les enfants et les nourrissons, d'accéder aux infrastructures scolaires et, en même temps, sensibiliser les gens à ne pas marginaliser les handicapés.

Enfin, le Dr. Kongnyuy se déclare féministe dans le sens où, dans une société juste et normale, les femmes doivent avoir les mêmes chances que les hommes. Dans un pays où les femmes sont considérées comme inférieures aux hommes, où les femmes n'ont pas accès à certains emplois considérés comme typiquement masculins, ou encore où elles n'ont pas accès aux postes de direction, on constate que ce pays n'est pas développé. Il a été démontré que si les hommes et les femmes reçoivent le même salaire, la femme l'utilise pour le bien de la famille, l'éducation des enfants et pour répondre à tous les besoins fondamentaux. Ce concept est bien développé dans le terme "dividende d’égalité" et montre que l'autonomisation des femmes profite à tous, et pas seulement aux femmes.

Par Claudia Berlendis

Moctar Mariko

Dialogues d'activisme avec Moctar Mariko, magistrat, activiste et Président de l’AMDH, la première Association malienne des droits de l'homme

Il n’y a pas de paix sans justice (Moctar Mariko)

Moctar Mariko est magistrat et Président de la première Association malienne des droits de l'homme (AMDH), créée en 1986 sous le régime du général Moussa Traoré (président du Mali entre 1968 et 1991).

Lors de sa création, l'association s'est attachée à défendre les droits des prisonniers en organisant des visites aux détenus dans les commissariats de police. Aujourd'hui, l'AMDH, qui fait partie de la FIDH et de la Commission africaine des droits de l'homme, intervient activement pour défendre toute personne ayant subi des violences ou vu ses droits bafoués. L'association lutte contre les abus économiques et sociaux perpétués par la puissance publique qui empêchent les personnes de s'émanciper, de vivre et de progresser.

Depuis 2012, le contexte malien a beaucoup changé en raison d'une rébellion armée, composée de soldats appartenant à la milice de Kadhafi qui, à leur retour au Mali, ont attaqué les trois régions du nord du pays. Pendant cette occupation, il y a eu de nombreuses violations des droits de l'homme comme le cas du camp militaire d'Aguelhock où 153 soldats maliens ont été massacrés par le Groupe Ganda Iso, fils du pays en sonrai. Cette affaire, grâce à l'AMDH, a atteint la Cour pénale internationale afin que justice soit faite.

Moctar Mariko dénonce les multiples meurtres et délits sexuels commis au Mali ces dernières années : de nombreuses femmes ont été violées, notamment dans la région de Tombouctou. Ces viols sont la conséquence, dans la majorité de cas, de mariages forcés : il est décidé qu'une fille sera donnée en mariage à un terroriste, mais pendant la nuit, elle est violée par plusieurs personnes. Des viols collectifs organisés et des crimes contre l'humanité ont été perpétrés par ces groupes armés.

L'AMDH a pu accompagner 120 femmes dans le processus de dénonciation des viols. Malheureusement, ces dossiers avancent avec difficulté dans un pays, comme le Mali, où la lutte contre l'impunité reste un combat ardu et difficile en raison des nombreuses implications politiques.

L'AMDH a également soutenu l'Etat malien pour poursuivre devant la Cour pénale internationale, Al Hassan Ag Abdoul Aziz Ag Mohamed Ag Mahmoud, pour les crimes commis dans le nord autour de la destruction des mausolées et pour avoir participé à la politique de mariages forcés des femmes à Tombouctou qui a conduit à des viols répétés et à la réduction des femmes et des filles en esclaves sexuelles. La CPI a condamné Ahmad Al Faqi Al Mahdi à neuf ans d'emprisonnement en tant que co-auteur de crimes de guerre.

Elle a également poursuivi Mahamat Aliou Touré, l'ancien chef de la police islamique de Bamako, pour violations répétées des droits de l'homme. Surnommé le "coupeur de mains", pendant l'occupation de la ville de Gao en 2012, Mahamat était chargé de couper les mains et les pieds des voleurs présumés et de flageller publiquement les femmes qui ne portaient pas le voile.  Mariko, l'avocat des victimes, a fait condamner Touré à dix ans de prison.

Le Mali est un pays où traditionnellement tout se règle dans le vestibule de la maison, ou sous les grands manguiers ou baobabs. Mais comment est-il possible, demande le magistrat, que quelqu'un qui a vu sa fille ou sa femme violée puisse s'asseoir autour de la même table que le coupable et lui pardonner, sans avoir vu aucun sentiment de repentir ? Il ne peut y avoir de paix sans justice, c'est pourquoi un changement de politique est nécessaire pour rendre cette justice effective et concrète.

Cependant, Moctar Mariko reste optimiste et dans cette optique, l'AMDH, avec le soutien d'autres partenaires internationaux, a organisé plusieurs formations pour les magistrats afin de renforcer leurs compétences et contribuer ainsi à un changement de cap.

Le rôle des personnes religieuses et la séparation de l'État et de la religion sont toujours une question sensible. Une nouvelle refondation de l'Etat malien est actuellement envisagée, basée sur un concept de laïcité également ancré dans la tradition du pays. Le Mali a en effet toujours été un mélange de populations unies pacifiquement par des alliances matrimoniales, mais pour améliorer la cohésion sociale le grand changement, selon le magistrat, est fondamental pour éduquer les nouvelles générations.

Au Mali, l'AICS intervient depuis quelques années avec des programmes d'urgence dans les zones les plus touchées par la crise, apportant une réponse rapide et efficace, capable d'améliorer les conditions de vie des populations et de renforcer la résilience des victimes des crises humanitaires. Au cœur de l'action de l'AICS au Mali se trouvent les besoins réels des populations touchées par les crises et les demandes émanant de la société civile et des institutions locales (approche basée sur les besoins).

Conformément aux engagements pris par l'Italie lors du Sommet humanitaire d'Istanbul, l'aide humanitaire italienne se concentre sur des priorités telles que la protection des personnes déplacées, des demandeurs d'asile, des réfugiés, le soutien aux communautés d'accueil, avec une référence spécifique au renforcement de la résilience ; l'accès aux services essentiels pour les populations civiles dans les situations de conflit et de post-conflit, en particulier pour les femmes, les filles et les enfants ; l'inclusion des personnes handicapées et des questions de genre dans l'aide humanitaire ; la violence sexuelle et sexiste dans les situations de conflit et la prévention et la réduction des risques de catastrophes.

En conclusion, citant à nouveau Mariko, il est nécessaire de valoriser les aspects positifs d'un pays, tel que le Mali, qui était basé sur le respect mutuel, le dialogue, l'accueil, les grandes traditions et la culture millénaire, mais sans oublier que, sans une réelle application de la justice ou avoir des cas d'impunité, la paix et la cohésion sociale au sein de la population ne pourront jamais être restaurées.

Par Claudia Berlendis

Abdoulaye Diop

Gynécologue, Obstétricien, échographiste et blogueur, Abdoulaye Diop est très actif et très suivi sur les réseaux sociaux avec une page Facebook, une chaîne YouTube et deux blogs. Son credo est : « instruire les femmes pour éduquer le monde ».

Abdoulaye Diop est un médecin engagé dans les causes féminines à la fois en ce qui concerne son travail de gynécologue mais, aussi, de blogueur. Il utilise beaucoup les réseaux sociaux pour sensibiliser sur les questions liées à la santé de la mère et de l’enfant ; pour informer sur les principales pathologies auxquelles les femmes sont confrontées et pour défendre les causes féminines telles que les MGF (Mutilations Génitales Féminines) et les VBG (Violences Basées sur le Genre).

Les réseaux sociaux lui donnent la possibilité de parler et d’informer sur beaucoup de sujets qui sont encore tabou. Un exemple est la question de l’infertilité, un sujet très peu connu et sur lequel les données manquent. Nous le rencontrons à la boutique des droits de la Medina à Dakar. Il nous explique qu’au Sénégal, ce sont les femmes à être indexées en cas d’infertilité du couple : elles peuvent être isolées au sein de la famille, obligées à divorcer ou à accepter des coépouses.

Diop vise à sensibiliser sur le fait que les hommes sont aussi impliqués que les femmes en cas d’infertilité. La difficulté majeure qu’il rencontre, en travaillant sur la question, est que les hommes refusent quiconque responsabilité et refusant ainsi de faire des analyses spécifiques. Il est important, selon le gynécologue, de dialoguer avec les couples pour leur expliquer les causes de l’infertilité et les solutions possibles, comme la procréation médicalement assistée (PMA).

Selon le Dr. Diop, une autre grande problématique de la PMA au Sénégal est qu’elle est réalisée quasi exclusivement dans le secteur privé et a des prix souvent élevés qui rendent ce service inaccessible à la plupart de la population.

Dans son cabinet, le Dr. Diop reçoit aussi régulièrement des patientes victimes des conséquences d’avortements clandestins, à savoir des hémorragies, des douleurs et, parfois, des cas d’infertilité.

Il tines à préciser que les statistiques, même si difficiles à obtenir puisque l’avortement est officiellement interdit, estiment à plus de 34.000 les cas d’avortements clandestins en 2020 au Sénégal[1]. Ces avortements ont de conséquences telles que les hémorragies et, parfois, des décès. Dans le premières dix causes de décès des femmes dans le premier trimestre de grossesse, il y a les avortements clandestins. Pour arriver à revoir à la baisse le taux de mortalité et de morbidité des avortements, Dr Diop se déclare militant de l’amélioration de la loi pour autoriser l’avortement médicalisé dans les cas de viol, inceste ou dans les cas d’enfant portant une malformation incompatible avec la vie.

Même si le Sénégal a ratifié le Protocol de Maputo, l’avortement médicalisé est permis seulement en cas de risques pour la vie de la mère, avec une procédure très longue et complexe qui prévoit l’autorisation de deux autres médecins, autre que le soignant, dont un nommé par tribunal.

Dans le cadre du Projet d’appui à la Stratégie nationale d’égalité et d’équité de genre (PASNEEG), financé par l’AICS, un comité technique avait été mis en place par le Ministère sénégalais de la Justice, afin de proposer une harmonisation de la législation nationale avec les instruments juridiques internationaux et régionaux ratifiés par le Sénégal. Avec le PSNEEG II, l’AICS est en train de coordonner un plan de plaidoyer avec les autres PTF afin de promouvoir la révision des lois discriminatoires (du code de la famille, code pénale, code déontologique) avec les parlementaires et le Ministère sénégalais de la justice et lutter contre l’impunité en cas de viol et de pédophilie en encourageant l’application de la loi du 10/01/2020.

Un autre grand tabou concerne le plaisir féminin. Il y a plusieurs femmes qui utilisent des artifices pour pouvoir augmenter le plaisir qu’elles procurent à leur partenaire et qu’ils inscrivent dans le concept de « diongué » sénégalais (l’art de la séduction) qui vise surtout le plaisir du mari, en incluant la sphère sexuelle. Malheureusement, parmi ces artifices, il y en a de potentiellement dangereux et qui ont des répercussions sur la santé des femmes, comme l’insertion dans leurs organes génitaux de poudres, encense, crèmes et plantes. Hors, l’utilisation de ces substances peut favoriser des infections et/ou des lésions des muqueuses et augmenter le risque d’infection en introduisant des germes extérieurs ; le risque de contracter une infections sexuellement transmissibles (comme le VIH) et de cancer[2]. Le Dr. Diop sensibilise sur ces aspects qui ont des conséquences néfastes sur la santé en utilisant aussi l’hashtag #LeVaginNestPasUneCuisine via les réseaux sociaux.

Le projet « Essere Donna », financé par l'AICS et mis en œuvre par l’ONG COSPE, vise à améliorer la santé sexuelle et reproductive des femmes de la région de Sédhiou, en Casamance, et à les soutenir dans l'exercice de leurs droits. Les problèmes liés à la santé sexuelle et reproductive sont nombreux et concernent la mortalité maternelle et infantile, les grossesses précoces non désirées, la propagation des maladies sexuellement transmissibles et non transmissibles. A cela s'ajoutent des pratiques répandues de mutilations génitales, de mariages précoces et de violences.

Très souvent, les femmes ne peuvent pas décider de leur propre corps et n'ont pas l'autonomie pour gérer les ressources économiques à allouer à la santé. COSPE accompagne les groupes ressources des femmes qui organisent de séances de discussions et sensibilisations sur les questions liées au pouvoir décisionnel sur la santé, les maladies et les risques d‘accouchements à domicile, les VGB et les pratiques néfastes sur les enfants et les jeunes filles, etc.

On commence également à parler de la violence obstétricale. Du point de vue culturel et symbolique, le rapport entre les soignants et les soignées est très déséquilibré. C’est dans ce déséquilibre qui s’installe la violence. Le Dr. Diop définit les violences obstétricales comme tous les actes, les paroles, les comportements qui sont réalisés par le personnel médical et paramédical à l’endroit des patientes lors d’une consultation gynécologique et/ou obstétricale allant du manque de respect à l'abus pur et simple, causant des traumatismes chez les patientes. Le personnel médical et paramédical, conclut le Dr. Diop, doit être sensibilisé car, le plus souvent, il n'y a pas de réelle prise de conscience du problème.

 

Par Eugenia Pisani

 

[1] https://www.ndarinfo.com/Avortements-au-Senegal-34-079-cas-recenses-en-2020_a32536.amp.html

[2] Pour plus d’info : https://ikambere.com/images/ressources/livre-pratiques-sx-ikambere.pdf

 

Djeneba Mariko Diop

Dialogues d’activisme avec Djeneba Mariko Diop, juriste et Présidente de l'Association pour la Protection et la Promotion des Droits de la Femme et de l'Enfant (APRODEFE), féministe.

Depuis plusieurs années, Djeneba Mariko Diop, Présidente de l'Association pour la Protection et la Promotion des Droits de la Femme et de l'Enfant (APRODEFE), se bat pour la défense des plus vulnérables, contre l'exploitation des enfants, notamment celle des filles travaillant comme domestiques, tant sur les sites d'orpaillage qu'en milieu urbain et rural.

En juin 2011, le gouvernement du Mali a adopté un plan d'action national pour l'élimination du travail des enfants et cela constitue une étape importante pour le changement, mais sa mise en œuvre a été retardée et peu d'actions concrètes ont été prises.

En vertu de la législation malienne sur le travail, les enfants ne peuvent être employés dans aucune entreprise, même en tant qu'apprentis, avant l'âge de quatorze ans, sauf dérogation écrite délivrée par décret du ministre du Travail, compte tenu des circonstances et des tâches locales.

À quelques exceptions près, une loi sur la protection de l'enfance fixe l'âge minimum d'admission au travail à 15 ans. Toutefois, elle autorise les enfants âgés de 12 à 14 ans à effectuer des travaux domestiques ou saisonniers légers et limite leur nombre d'heures de travail: ainsi, il est interdit à un enfant de travailler plus de huit heures par jour et les filles âgées de 6 à 18 ans ne peuvent travailler plus de six heures. Toutefois, la loi ne respecte pas les normes internationales minimales relatives à l'interdiction du travail forcé, de l'utilisation d'enfants dans des activités illégales et du recrutement militaire par des groupes armés non étatiques.

En ce sens, les mines artisanales ne sont pas soumises à des inspections régulières du travail et l'interdiction du travail des enfants n'est pas appliquée.  Selon le droit malien et international, les travaux dangereux, qui incluent le travail dans les mines et avec le mercure, sont interdits aux personnes de moins de 18 ans. Néanmoins, selon le HCR, environ 20 000 enfants travaillent actuellement dans huit sites miniers du pays. Dans les mines d'or artisanales, selon la Confédération syndicale internationale, les enfants travaillent dans des conditions extrêmement difficiles et au contact du mercure, une substance toxique utilisée pour séparer l'or du minerai.

Les filles sont employées encore plus tôt que les garçons dans ce secteur et avec une charge de travail plus importante. De plus, plus que les garçons, elles sont victimes de violences, sous-payées ou non.

Madame Diop Djeneba Mariko se bat pour protéger les filles et les jeunes femmes, leur faire prendre conscience de leurs droits et les soutenir dans leur processus d'autonomie.

Au Mali et dans cinq autres pays de la région (Sénégal, Guinée, Guinée Bissau, Gambie, Niger), l'Agence Italienne pour la Coopération au Développement (AICS) finance le Projet d'appui à la protection des enfants victimes de violations des droits de l'homme (PAPEV), un programme régional mis en œuvre par le HCDH (Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme). Ses objectifs sont notamment de soutenir les États membres de la CEDEAO dans l'élaboration de politiques et programmes nationaux visant à protéger les enfants victimes d'abus et d'exploitation et d'accompagner la CEDEAO dans l'élaboration d'une stratégie de promotion et de protection des droits de l'enfant, conformément aux Objectifs de développement durable (ODD) et aux conventions internationales en la matière (CDE, CADBE et CEDAW). Le PAPEV mène des activités pour soutenir l'adoption d'instruments juridiques régionaux et internationaux pour la protection de l'enfant, des activités de plaidoyer pour accompagner les réformes juridiques et la mise en œuvre de campagnes de communication nationales pour sensibiliser aux réformes législatives en cours.

Djeneba Diop, juriste de profession, a consacré sa vie à la défense des plus vulnérables. Immédiatement après avoir obtenu son diplôme en droit, elle a été secrétaire exécutive de l'association de défense des droits des enfants malentendants dans les écoles, puis a créé APRODEFE, l'association dont elle est la présidente.

Ce choix lui a posé de nombreux obstacles dans une société conservatrice comme celle du Mali, où il existe de nombreux stéréotypes sur les militants, qui sont souvent accusés d'aller à l'encontre de la tradition et de la culture.

Au Mali, le rôle des femmes est également souvent confiné à la sphère domestique et aux soins : lorsqu'une femme souhaite jouer un rôle politique actif dans la gestion de la communauté, elle est fortement critiquée. Il est donc nécessaire d'éradiquer les stéréotypes, les mythes et les préjugés, comme Djeneba Diop tente de le faire au quotidien, en racontant, par exemple, le rôle actif des femmes dans le processus de réconciliation et de paix qui se déroule au Mali depuis 2012. La juriste est le point de référence de la Commission Vérité, Justice et Réconciliation (CVJR) du district de Bamako, dans les régions de Kayes et Koulikoro, qui a un mandat en matière de droits de l'homme depuis 1960.

Le Ministère malien de la Promotion de la Femme, de la Famille et de la Protection de l'Enfant à travers le Comité National de Suivi des Actions de Lutte contre la Traite, l'Exploitation et le Travail des Enfants (CNS), le Ministère de la Justice à travers les différents tribunaux, le Ministère de la Sécurité à travers la Brigade de Protection des Mœurs et de l'Enfance de la Police Nationale, l'Institut National de Sécurité Sociale à travers son service de santé et le Ministère du Travail et de la Fonction Publique à travers l'Inspection du Travail ont une responsabilité partagée dans l'application des lois sur le travail des enfants. Toutefois, les mécanismes de coordination inter-institutionnelle restent inefficaces et complexes, et les ressources, les inspections et les actions correctives demeurent insuffisantes. La crise politique déclenchée par le coup d'État d'août 2020, suivi de la nomination d'un gouvernement qui a été dissous à nouveau après l'éviction du président par les militaires en mai 2021, a exacerbé et compliqué la situation. Parallèlement à la crise gouvernementale, la même période est marquée par la pandémie de Covid-19.

L'exemple de Djeneba Mariko Diop montre que le changement doit pouvoir partir de la base, dès les autorités locales, traditionnelles et religieuses et ne pas être imposé d'en haut. En soutenant l'autonomisation des filles et les OSC locales, un impact plus important pourrait être obtenu pour une promotion réellement efficace et efficiente de l'égalité des sexes et de la défense des droits de l'homme.

Par Claudia Berlendis
Coordinatrice pays - Mali
AICS Dakar

Fatou Warkha Samb

Dialogues d’activisme avec Fatou Warkha Samb, journaliste, cinéaste, créatrice de la plateforme Warkha TV, vice-présidente du collectif Dafa Doy, féministe.

C'est une journée chaude, malgré le vent. J'ai relu une fois de plus le « Manifesto di Rivolta Femminile », de Carla Lonzi, une institution du féminisme italien. Nous nous préparons à rencontrer Fatou Warkha Samb, en première ligne dans la lutte pour les droits des femmes au Sénégal. Fatou Warkha Samb s'est fait connaître par le travail d'information qu'elle a mené via les réseaux sociaux, mais aussi par sa présence constante à la télévision, où elle est souvent la seule femme à être confrontée à plusieurs hommes sur des questions concernant les femmes. Grâce à WarkhaTV, la plateforme qu'elle a lancée, elle a fait du militantisme une priorité, contribuant à lever le voile du silence sur la violence à l'égard des femmes et des enfants.

Aujourd'hui, au Sénégal, on parle de plus en plus de féminisme et de droits, grâce aussi à des féministes comme elle qui n'ont pas peur de défier les préjugés et les systèmes culturels. Nous la retrouvons au Musée des femmes Henriette-Bathily à Dakar, où sont exposées des photographies de femmes qui ont marqué l'histoire du pays : Andrèzia Waz, première Présidente de la Cour de cassation ; Dior Fall Sow, première Procureur de la République ; Mame Bassine Niang, première avocat ; Maty Diagne, première parachutiste militaire ; Sokhna Dieng, première Directrice de la télévision nationale.

Entrons dans le vif du débat. « La pratique du féminisme est essentielle », explique-t-elle, « et pour moi, cela a signifié faire de mon métier, en tant que journaliste et réalisatrice, un moyen de lutte contre les inégalités et de promotion des droits des femmes. Comment ? En créant du contenu ».  Un militantisme quotidien né dans un environnement où les inégalités étaient et sont, malheureusement, présentes. « Avec mon exemple, je veux montrer que les limites imposées peuvent être dépassées et que ce message peut être diffusé. Être une femme ne devrait pas être un obstacle, bien au contraire », souligne Mme Samb.

Je lui demande si elle pense que nous pouvons parler d'un mouvement féministe sénégalais. « Oui « , répond-elle, « même s’il n'est pas structuré, il est constituée d'individualités, de jeunes femmes engagées . Il y a encore beaucoup d'ignorance sur le sujet, et pourtant, qu'est-ce que c’est d’être féministe ? Il s'agit de promouvoir les droits des femmes et de prendre conscience, en tant que femmes, de ce que nous pouvons faire, de nos capacités ».

Dafa Doy. Jamais plus ça ! Les réseaux sociaux ont été fondamentaux dans l'activisme féministe sénégalais, non seulement en raison de la diffusion de contenus spécifiques, des grands nombres atteints ou des longues distances parcourues, mais aussi en raison de la possibilité de s'exprimer de manière anonyme, ce qui n'est pas une mince affaire dans une société où la sutura (discrétion) prévaut. Fatou W. Samb fait partie des fondatrices et est vice-président du collectif Dafa Doy, constitué après le viol et le meurtre, en 2019, de Binta Camara, 23 ans, et d'autres affaires de viol. « Dafa Doy est né spontanément car, à cette époque, de nombreuses personnes partageaient le besoin de dire : Nous en avons assez ! Plus de violence ! Plus de viols impunis ! », précise le journaliste.

Le 25 mai 2019, le collectif a organisé un sit-in contre les violences faites aux femmes et aux enfants, auquel de nombreuses personnes se sont jointes. Toujours à la suite de cette mobilisation, le 10 janvier 2020, la loi n° 2020 -05 a été promulguée, durcissant les peines pour le viol et la pédophilie. Selon les statistiques de 2019, le Sénégal a enregistré 668 cas de violence contre les enfants, 206 agressions sexuelles, 15 féminicides et plus de 1200 cas de viols .

L'accès à la justice est un besoin réel et urgent pour des milliers de femmes. Dans le cadre des projets PASNEEG I et PASNEEG II, l'AICS soutient les « Boutiques de droits », structures gérées par l'Association des Juristes Sénégalaises (AJS), qui sont devenues des points de référence essentiels dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Dans ces centres de promotion et de protection des droits des femmes, situés à Dakar, Kaolack, Kolda, Thiès, Sédhiou et Ziguinchor, des consultations juridiques gratuites et une orientation vers des services spécialisés sont proposées. Soutien juridique, mais aussi soutien à la réintégration psychologique, sociale et économique. Le projet prévoit également de renforcer le débat avec les professionnels des médias, par le biais de formations et de panels dédiés, comme celui organisé en décembre 2020 dans une école de journalisme réputée de Dakar, axé sur le contenu médiatique lié aux VBG et à la discrimination à l'égard des femmes et des filles. Un engagement concret pour rendre le droit accessible, sensibiliser, contribuer au changement de comportements.

Les féministes sous attaque. « Il y a clairement une peur du changement qui est en train de se faire. La peur d'une prise de conscience collective de la part des femmes et du poids politique, social et culturel que cette prise de conscience implique », dit Mme Samb, et poursuit : « De plus en plus, de femmes trouvent le courage de s'affirmer, de dire ce qu'elles pensent, de revendiquer leurs droits et, surtout, de dénoncer. La plupart des attaques proviennent d'hommes, qui ont probablement peur de rompre avec un système qui les a privilégiés jusqu'à présent ».

Pouvoir choisir. Pour Fatou W. Samb, le féminisme devrait quitter un niveau théorique et devenir pratique, identifier ses propres objectifs et les atteindre. Il ne suffit pas de se déclarer féministe, il faut l'être dans la vie de tous les jours, à travers ses actions et ses expériences. « Chaque jour je me demande ce que je peux faire en tant que féministe » conclut Mme Samb « aujourd'hui il y a des victimes de viol ou d'inceste qui voudraient pouvoir avorter et qui ne le peuvent pas. C'est notre mission, pouvoir garantir à ces victimes la possibilité de choisir mais pas seulement cela, aussi expliquer, de manière simple, ce que l'on entend par inégalités ou quels sont les droits de chacun. Divulguer, c'est combattre. Enfin, nous devons faire de l'égalité tant citée, une réalité. Depuis que je suis enfant, on nous a fait croire que cela allait de soi. Malheureusement, ce n'est pas le cas et seule la pratique du féminisme permettra de le rendre effectif ici et ailleurs ».

Warkha TV produit actuellement une série d'émissions en wolof, la langue locale la plus parlée, pour expliquer les impacts positifs de l'égalité des sexes sur le développement, dans le cadre du projet PASNEEG II.

Par Chiara Barison

L’AICS finance 52 entreprises de la diaspora grâce au programme PLASEPRI/PASPED

Le 9 mars passé a été une journée importante pour la coopération entre l'Italie et le Sénégal sous le signe des opportunités pour la diaspora sénégalaise qui a décidé, au cours de l'année 2021 à travers l'appel européen « Investo in Sénégal », d'investir dans son pays d'origine. En présence de l'Ambassadeur d'Italie, M. Giovanni Umberto de Vito, du Chef de la Coopération de la Délégation de l'Union Européenne à Dakar, Mme Dorota Panczyk, du Délégué Général à l'Entrepreneuriat Rapide, M. Papa Amadou Sarr, du directeur de l'AICS Dakar, M. Marco Falcone et la directrice adjointe de l'AMREF Mme Roberta Rughetti, les entrepreneurs et entrepreneuses de la diaspora qui ont été accompagnés et financés dans le cadre du programme PLASEPRI/PASPED ont participé à la cérémonie de signature des contrats de subvention.

Au total, 52 projets (subventionnés par AICS/PASPED jusqu'à 30 000 EUR) d'une valeur totale de 1 122 000 EUR ont été financés dans six régions. Une nouvelle génération de la diaspora qui fait face à ce type d'opportunité : des femmes et des hommes ingénieurs, agronomes, économistes d'entreprise, artisans du bois et de l’art made in Italy, sont quelques-uns des profils et des compétences concernés par l'opportunité « Investo in Sénégal » et qui sont arrivés hier au terme du processus de sélection en signant des contrats de subvention avec l'AICS Dakar dans le cadre du programme PLASEPRI/PASPED.

Certains chiffres en disent plus long que bien des mots sur cette opportunité : 23% des entreprises bénéficiaires sont composées de membres âgés de moins de 35 ans ; 46% sont des femmes et 67% des entrepreneurs ont une formation universitaire ou au moins un certificat de formation professionnelle.

Une nouvelle génération de la diaspora, donc, qui a relevé un véritable défi entre les deux pays et qui constitue, en même temps, un pont entre deux mondes qui ont su, dans cette belle expérience, valoriser positivement la collaboration entre les institutions, la société civile et le secteur privé aussi bien en Italie qu'au Sénégal.

Par Francesco Mele
Expert en co-développement et en employabilité des jeunes du PASPED

L’engagement de l’AICS pour la promotion de l’égalité de genre à travers la lutte contre les mutilations génitales féminines en Afrique de l’Ouest

Aujourd'hui, 6 février, on célèbre la journée internationale de la tolérance zéro à l'égard des mutilations génitales féminines (MGF), un phénomène répandu principalement en Afrique, mais présent sur tous les continents.  Selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les mutilations génitales féminines sont toutes les procédures impliquant l'ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme, ou toute autre lésion des organes génitaux féminins pour des raisons autres que médicales. De telles pratiques ont de graves conséquences sur la santé des femmes à court et à long terme : outre la douleur et le traumatisme psychologique - qui peut entraîner des pathologies telles les troubles du stress post-traumatique (TSPT) -, il existe un risque d'infection et de septicémie qui peut entraîner un risque de perte du plaisir sexuel et/ou de douleurs lors des rapports, des problèmes urinaires, des complications lors de l'accouchement et de l'infertilité, et dans certains cas, la mort.

En Afrique de l'Ouest, diverses conventions ont été adoptées pour interdire ces pratiques, pourtant au moins 50% des femmes les subissent[1].  Le Sénégal et la Gambie disposent également d'une législation nationale interdisant les MGF. Néanmoins, 24% au Sénégal (EDS 2017) et 73% des femmes et filles en Gambie (DHS 2019-2020) ont été excisées. Dans d'autres cas, comme au Mali, où il n'existe pas de législation nationale, en 2017, le pourcentage a dépassé 90 % des femmes âgées de 15 à 49 ans[2].

L'AICS Dakar, à travers ses projets au niveau régional, promeut l'égalité des sexes, l'autonomisation des femmes et l'éradication de la violence contre les femmes et les filles.

Au Mali, en finançant l'UNFPA, l'AICS veut mettre fin aux violences faites aux femmes : grâce à cette intervention, 100 communautés devraient abandonner les pratiques de MGF en 2022.

En Gambie, avec le projet PAPEV, l'AICS promeut la protection des droits de l'enfant par le biais d'un programme régional visant à renforcer les mécanismes de coordination entre les pays d'Afrique de l'Ouest, afin de protéger les enfants et les filles, avec également des activités de sensibilisation concernant les MGF.

Au Sénégal, l'AICS soutien à la fois le gouvernement dans la mise en œuvre de la stratégie nationale d'égalité de genre- PASNEEG II - et l'ONG Cospe à Kolda avec le projet Être Femme. Les deux interventions font appel à la sensibilisation communautaire, par le biais de campagnes radiophoniques, de pièces de théâtre et d'événements communautaires. Ces actions impliquent les chefs religieux et coutumiers, les réseaux de jeunes, les journalistes et la société civile dans les régions de Sédhiou et de Kolda - qui enregistrent les taux les plus élevés de MGF (respectivement 75,6 et 63,6%). En outre, la collaboration avec le Ministère de la Femme, de la Famille du Genre et de la Protection des Enfants (MFFGPE) permet aux experts de l'AICS de participer à la validation politique de la stratégie nationale pour l’abandon de l'excision (2022-2030) et de son plan d'action (2022-2027).

À l'occasion des 16 jours d'activisme contre la violence basée sur le genre (du 25 novembre au 10 décembre) l'AICS a organisé, en partenariat avec l’Union Européenne, le Canada, UNICEF et Onu Femme, une campagne contre les stéréotypes de genre, en commandant des portraits de divers activistes, dont Hyacinthe Coly, secrétaire exécutif du Réseau de jeunes pour la promotion de l'abandon des mutilations génitales féminines et des mariages des enfants, un réseau très actif au Sénégal.

En conclusion, l'AICS s'engage à adopter une approche holistique pour atteindre l'égalité de genre et mettre fin à la violence contre les femmes. Cet objectif ne peut être atteint sans un engagement sérieux à mettre fin aux mutilations génitales féminines. La stratégie adoptée est donc, d'une part, la sensibilisation au niveau communautaire et la collaboration avec les réseaux d'activistes et les organisations de la société civile et, d'autre part, le plaidoyer au niveau national.

Livia Cesa

[1] OECD, 2018, Selon une nouvelle étude de l'OCDE, la lutte contre les institutions sociales discriminatoires profitera aux économies ouest-africaines, https://www.oecd.org/fr/csao/infos/lutte-contre-institutions-sociales-discriminatoires-profitera-aux-economies-ouest-africaines-etude-ocde.htm

[2] Andro, A. & Lesclingand, M. (2017). Les mutilations génitales féminines dans le monde. Population & Sociétés, 543, 1-4. https://www.cairn.info/revue-population-et-societes-2017-4-page-1.htm?ref=doi